La longue marche du peuple bamiléké

Publié le par marcusconnect

Jacques Doo Bell

“Quand on ne sait plus où on va, on se souvient de son point de départ”, dit une sagesse populaire bien de chez nous. Celle-ci sert de fil d’Ariane à un groupe de cadres camerounais, tous originaires de la province de l’Ouest. Ils se sont assignés une mission ô combien louable : “étudier l’histoire des peuples de la région de l’Ouest-Cameroun pour en dégager des éléments et inculquer ceux-ci à ses membres afin qu’ils participent mieux au développement de l’Ouest en particulier, du Cameroun en général; 
rechercher et vulgariser dans les langues locales les cultures ancestrales de l’Ouest-Cameroun et  les adapter aux exigences du développement humain moderne”.

Tout commence bien avec l’essai de restitution de l’origine des chefferies bamiléké à la lumière des travaux du père Mveng, Victor Ngoh, Emmanuel Kungne, etc. Pour arriver à la conclusion selon laquelle toutes les chefferies bamiléké ont leurs origines chez les Tikar comme du reste leurs voisins et cousins bamoun. Mais M. Joseph Ngongang  s’interroge encore sur la fiabilité de cette étude qui ouvre plutôt le débat sur l’origine des peuples binam.

L’ingénieur Kameni Djouteu se demande si les Binam ne seraient pas des descendants de la 12e tribu d’Israël disparue durant l’exode entre l’Egypte et la Terre promise! Ils auraient remonté le Nil pour se retrouver au Kenya d’où ils seraient partis pour se retrouver dans la plaine Tikar. Selon cet ingénieur électromécanicien, 7 rites et le port du tissu Ndi Ndop caractérisent l’ensemble des peuples du soleil couchant. Ces rites sont :  Le Dedam (jujube), le Nduq-Nka (vin de raphia et la kola), le Ndoo (malédiction), le fiekak (arbre de paix), le double-gong ou tam-tam, la queue de cheval, le Nji ndob (toile noire de tradition).

L’exposé du Dr. Tedji portera sur le dynamisme des Bamiléké, peuple très entreprenant et travailleur qui a bâti sa fortune sur l’économie agricole. Aujourd’hui, les descendants des anciens ouvriers agricoles dominent des secteurs entiers de l’économie nationale entre autres la quincaillerie où leurs seuls concurrents sont les Nigérians. En outre, ils règnent en maîtres sur l’hotellerie, la distribution, l’enseignement privé, la communication, etc.

Syndrome 
Toutefois, il n’a pas manqué de souligner que le dynamisme économique binam a été favorisé par le coup de pouce de l’Etat grâce au système des autorisations et de contingentement. Face à la globalisation, le Dr. Tedji propose une réorientation des activités des hommes d’affaires binam vers des secteurs plus porteurs que sont les banques, les assurances, la communication. Car “il faut aller au-delà de la force du travail de la cosmogonie pour investir dans le savoir…”, souligne-t-il.

Plus militant, le Dr. Pierre Flambeau Ngayap parlera des atouts et des faiblesses du peuple binam qui en font malgré tout un peuple leader. Et il précise que “la nature ne dispense pas des atouts pour rien. C’est pour que ces atouts soient utilisés à des fins précises”. Avec des chiffres ne reposant pas sur des données statistiques avérées, Pierre Flambeau Ngayap tente de démontrer le leadership des Binam dans tous les secteurs d’activité. A en croire ce politologue, les Bamiléké disposent de la majorité des magistrats, avocats, huissiers de justice camerounais. De plus en plus, assure-t-il, ils dominent le football camerounais. Il se demande cependant s’il suffit d’être majoritaire pour peser sur la marche du pays. Déjà que sur le plan politique, aucun leader binam n’a vraiment émergé de manière durable. Pire ils n’occupent pas de position de pouvoir dans les structures de décision de l’Etat. Le cadre de l’UNDP souligne que les Bamiléké ne font que 3% du gouvernement camerounais bien qu’ils soient les plus nombreux sur le plan démographique.

Remarque on ne peut plus pertinente: Tikar, Bamoun et Bamiléké constituent le peuple binam, la causerie s’est limitée à une sorte d’apologie de l’une de ces trois composantes, les Bamiléké. Et comme pour conclure Jean-Baptiste Sipa soulignera que “la problématique du Bamiléké-Binam dans le Cameroun d’aujourd’hui peut être résumée en un mot : syndrome.

Un syndrome qui frappe aussi bien les Bamiléké eux-mêmes sous forme de complexes divers et les autres sous forme de réflexe allergique ou de peur à l’endroit du Bamiléké”. A la question de savoir, par exemple, pourquoi le Bamiléké est-il généralement vu par les autres d’abord comme peureux avant d’être taxé de “commerçant véreux” et “d’envahisseur”, Jean-Baptiste Sipa apporte cette réponse : “Parce que tout en s’auto satisfaisant d’être “le plus travailleur” ou “le plus producteur”, il se sent absolument sans moyens quand il faut défendre ses droits et intérêts face aux autres, et se réfugie derrière un pacifisme résigné, qui, au final, s’avère un manque de foi en lui-même, ou une négation de sa valeur. “Un vendeur d’œufs ne cherche pas de palabre” quand bien même on casserait tous ses œufs. Car, il est convaincu de pouvoir produire d’autres œufs.”



source: Bamileké.com

Publié dans culture

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